13 Novembre 2019
Des militantes féministes, la maison des femmes de Montreuil et le collectif "Collages féminicides" ont affiché leur colère et leur révolte au cinéma Méliès où le film de Roman Polanski "J'accuse" est programmé en sortie nationale.
Je comptais écrire sur les collages féminicides qui s'affichent sur les murs de Montreuil, et font l'objet d'un voeu d'un engagement municipal à ne pas les verbaliser, leur reconnaissant un intérêt général et des valeurs à porter haut. J'ai pris quelques photos des collages les plus visibles de la place Jean-Jaurès... Et vu que le"j'accuse" de Roman Polanski était programmé au Méliès. Et j'ai retenu ma plume. Je la relâche ce soir, pour le courage des femmes qui ont agi au cinéma Méliès, en allant mener leur action au cinéma Méliès, confronter les spectateurs.
Je salue l'acte militant de ce soir. Parce que c'est aussi mon affaire, notre affaire. Parlons des affaires, à rebours.
L'affaire "j'accuse", c'est celle d'un réalisateur, Roman Polanski, réalisant un film sur le plus célèbre des complots judiciaires, alors qu'il fuit lui même la justice pour des faits d'abus sexuels sur mineure. La sortie de ce film provoque un témoignage d'une femme accusant Polanski d'un viol brutal. C'est la cinquième ou sixième femme ou adolescente accusant Polanski. Dans ses déclarations Polanski évoque des parallèles entre son histoire et celle d'Alfred Dreyfus. Séparer l'homme de l'artiste? C'est quand même ici très problématique tant les mécanismes d'identification sont évidents, et parfois assumé. Mais dans cette affaire, quand on veut s'identifier il faut le faire sans confusion. Polanski est-il l'accusé Dreyfus? Le témoin Picquart? Ou Zola, l'avocat grandiose?
Je suis passionné par l'affaire Dreyfus, mais c'est regrettable que ce soit précisément Polanski qui la présente au cinéma. C'est regrettable parce que l'affaire Dreyfus fait date dans l'histoire de l'engagement. Engagement des écrivains, bien sûr, avec Zola, mais aussi engagement des cinéastes. le premier film engagé, il date de 1899, il est tourné à Montreuil, par Georges Méliès. le voici.
C'est regrettable parce que Roman Polanski semble faire un film dans lequel l'engagement, justement, paraît surtout être pour sa propre cause.
Oui, ce film, ce titre, cette utilisation du symbole de Dreyfus est une provocation vis à vis des accusatrices de Roman Polanski. J'étais curieux, impatient de ce film sur une affaire qui, comme je l'ai dit, me passionne. Mais voilà, l'engagement. Et le devoir d'être allié et soutien des féministes.
Fallait-il ne pas le programmer au Méliès? Là c'est une question qui touche pour moi à une affaire sensible. Je m'interdis d'avoir un avis sur ce qu'il faudrait faire ou ne pas faire en tant que programmateur, parce que... les affaires Méliès. Mon avis sur la question serait sans doute faussé par le grave conflit que j'entretiens avec Stéphane Goudet, et par là même donner mon avis serait suspect.
C'est une autre affaire qui m'a fait aboutir à ce point de vue de réserve avant de gueuler ou d'écrire "J'ACCUSE" : l'affaire Baupin. Ma position a évolué depuis ces deux article de 2016
http://www.tous-montreuil.fr/2016/05/goudet-et-montreuil-un-elevage-de-corbeaux-dresses.html
Depuis à EELV une cellule de veille et d'alerte sur les questions de harcèlement sexuel a été mis en place, et j'ai eu l'occasion de parler avec certaines copines qui m'en ont expliqué le fonctionnement, les limites, les écueils. Le principal, et c'était celui que je dénonçais en 2016, c'est que dans un parti politique, les antagonismes ou alliances sont importantes. A qui, alors dénoncer des abus, balancer un porc? A une copine adversaire du porc en question, qui risque d'être suspecte d'instrumentaliser la confidence, ou à une alliée du porc qui va au contraire le protéger? Ce n'est pas simple. Mais certaines essayent d'avancer.
Bon, c'est pas vraiment le sujet. Le sujet c'était de saluer celles qui font avancer le débat, en changeant la honte de camp et en s'imposant dans l'espace public contre les agresseurs, même ceux qui ont tellement de talent que pour certains ils n'ont pas à rendre des comptes pour leurs actes et des souffrances qu'ils infligent. On finit en photos
Des centaines de femmes sont assassinés en France chaque année par leur conjoint, compagnon ou ex. Est-ce notre affaire? Ce sont nos voisines, nos collègues, nos copines, les femmes de nos familles. Oui, la honte doit changer de camp. On peut commencer en les écoutant, en étant attentif. C'est le début d'une protection.